Connue au 19ème siècle pour son commerce et son industrie dans les domaines du bois, de l’élevage du cheval percheron, de la production de textile et du chanvre, la ville de Mamers était aussi connue au début du 20ème pour ses cultures céréalières, ses dentellières et ses foires agricoles. Joseph Caillaux, député de la circonscription, ministre et président du conseil , en fut un des fervents représentants à la capitale.
Sur le plan militaire, Mamers, suite à la loi du 06 aout 1874, devient chef lieu de subdivision de région territoriale en charge d’assurer le recensement et la mobilisation (si besoin) de la nouvelle armée territoriale (cf. carte ci-dessous).
Dans le cadre de la loi sur l’organisation des armées du 24 juillet 1874 et du décret du 21 novembre 1874 et suite à l’action de la municipalité, Mamers allait devenir une ville de garnison.
Le 01 mai 1877, Mamers devient ville de garnison.
Elle accueille alors les appelés des classes en provenance de Paris, de la Mayenne, de l’Orne et bien sûr de la Sarthe.
La garnison de Mamers fait rarement la joie de son soldat. Nombreux sont les commentaires peu sympathiques pour cette petite ville du nord Sarthe. Ci dessous quelques extraits collectés au dos des cartes postales (CPA):
– « …Pour l’instant la vie militaire est moche, la ville est pas belle. Il y a que les petites cousines pour nous distraire mais surtout la musique… » mars 1905. Ce soldat parle t’il de la maison de tolérance et des 7 demoiselles logeuses au 10 rue Chatelaine?
– « …je suis arrivée à Mamers. La ville n’est pas bien belle mais je pense m’y habituer quand même malgré que les premiers jours je me suis bien ennuyer auprès de la vie civile … » juin 1907.
– « … j’ai quitté le Mans il y a 8 jours, je suis à Mamers maintenant, c’est pas une belle ville. Le métier ça va à moitié, j’ai eu un peu de mal à marcher au pas. La nourriture ça va à moitié. Pour commencer on en avait trop, maintenant on en a à peine… » octobre 1910.
– « … mais la ville quel trou. A 7 heures toute la ville dort. Je regrette CHARTRES car ici on ne peut les mettre en perm car pour aller à PARIS, il faut changer 4 fois de train on met 13 heures en route. Comme tu vois ce n’est pas le plan! » février 1919.
Les dimanches (jour de repos), le soldat cherche à s’extraire de la caserne. Dès lors il se promène avec ses camarades d’escouade.
« … Dimanche dernier nous avons été nous promener à Origny le roux à trois kilomètres de Mamers, dans un petit patelin prendre un verre. Le dimanche nous parait moins long que de rester à la caserne … »
Elle accueille aussi les cadres professionnels et leur famille.
Une étude du recensement de MAMERS (source archives départementales) de l’année 1906 nous donne quelques informations sur les cadres du régiment, ces derniers étant astreints à loger en ville.
54 officiers, 29 sous-officiers, 5 personnels civils du 115e RI et du bureau de recrutement sont déclarés sur le registre de 1906.
Concernant les officiers, ceux-ci logent tous en ville et aucun d’entre eux dans la caserne. 25 sont célibataires et 29 sont mariés dont 10 sans enfant au domicile en 1906. Leur age est compris entre 23 et 59 ans (le chef de corps) pour une moyenne de 38 ans.
Pour les sous-officiers, 29 sont identifiés sur le registre. Il s’agit surement des ré engagés. Leur age est compris entre 26 et 41 ans pour une moyenne de 31 ans. 2 seulement sont célibataires, les autres étant mariés dont 13 avec enfants.
Plusieurs familles vivaient dans la caserne et chose étrange, il s’agissait majoritairement de civils. On dénombre:
– un casernier, LEMEN François, marié;
– un horloger cantinier, DERESSE Georges, marié;
– un cantinier, DELAROCHE Casimir, marié;
– un armurier cantinier, le caporal LEGEAY Julien, marié avec 2 enfants en 1906.
Enfin le recensement nous indique que le maitre tailleur du régiment , M LOUVEL Ernest, habitait en ville tout comme un autre armurier, SCHELL Alphonse.
Plusieurs CPA nous permettent de retrouver les soldats de la caserne dans les rues de Mamers ou dans les environs proches.
En premier lieu, nous retrouvons nos militaires sur la place de la République. Point central de la ville où les soldats défilaient ou réalisaient des cérémonies, cette place accueillait le cercle militaire. Il s’agit d’un espace de sociabilité mettant à disposition des militaires gradés, un certain nombre de services (bibliothèque, salle de réception, billard, chambres de passage, téléphone (dès 1889 source gallica) …). Ce cercle permettait aussi aux chefs de corps de recevoir des autorités (députés, sénateurs, ministre (M CAILLAUX en mai 1901), …). Les officiers appelés (dont médecins, pharmaciens, vétérinaires, …) logeaient en principe au cercle.
Les cafés et estaminets rassemblaient aussi les militaires en quartier libre comme ce sergent fourrier et 3 soldats semblant réaliser quelques courses.
La place Carnot d’avant guerre, sans son monument aux Morts (1922) ou sa fontaine (1985) mais avec son bar « la rotonde », l’église Saint Nicolas et ses halles, était un lieu propice à fixer sur une plaque de verre photographique l’image d’un militaire. Il en était de même pour la rue Nationale (actuelle rue du docteur GODARD), la rue Charles GRANGER, la rue DENFERT ROCHEREAU qui conduisaient au régiment. Ensuite, on retrouvait nos troupiers dans toutes les rues ou l’on trouvait un café ou des appartements à louer.
Seul posant devant l’objectif comme ce cycliste et ce sergent du corps administratif ou de l’état-major, en groupe devant le théâtre, sur la place sortant certainement de la messe du dimanche ou rentrant en ordre serré vers la caserne par la rue Nationale , le soldat est souvent la cible du photographe et montre une omniprésence au sein de sa ville.
A proximité de la place Carnot, on retrouve nos soldats dans la rue du Fort ou la Grande Rue (actuelle Rue du 115ème RI) où l’établissement « Brière » tabac, vins et café semblait avoir un certain succès.
CPA écrite le 20/09/1904 par le commandant BORDEAUX.
2 militaires en bourgeron sont présents sur cette carte. Il semble plus d’astreinte qu’au jeu!
Peu d’information sur l’emplacement de ces terrains de « Lawn-Tennis » (Jeu de Paume sur gazon, en anglais) à cette époque! Il est cependant probable que ceux-ci soient sur le terrain de manœuvre de Saint-Jean.
Selon le recensement de 1906 et la base LEONORE, le commandant BORDEAUX Alexandre était le chef du bureau de recrutement de MAMERS.
CPA photo écrite le 24 octobre 1908 par Louis HURAULT à mademoiselle Berthe BOURGERIE, Belleme, orne.
Ici un sergent fourrier et un sergent sur la place Carnot, dos au théâtre.
Louis HURAULT, qui est certainement l’un des deux hommes, sera sergent major à la déclaration de guerre et sera fait prisonnier au camp de SOLTAU, HANNOVRE (cf. page 115 1914-1919 prisonniers de guerre). Mademoiselle Berthe deviendra madame HURAULT.